Weekly Update - La viscosité de l’inflation
Les chiffres d’inflation américaine pour le mois d’août ont provoqué de nouvelles turbulences sur les marchés. Les investisseurs s’attendaient à une baisse plus marquée des tensions sur les prix, dans le sillage de la baisse des prix de l’énergie américaine et de l’accalmie des tensions sur les chaînes de production. C’était sans compter sur le phénomène de « viscosité » des prix, concept étudié dans les livres d’économie portant sur une époque que l’on pensait révolue. La Réserve fédérale pourrait aller plus loin dans son resserrement et ce dès la semaine prochaine.
Une inflation américaine qui peine à diminuer. L’inflation d’août a déçu, avec une nouvelle augmentation des prix sur le mois. La nette baisse des prix de l’énergie (-10% sur le mois) a été plus que compensée par des hausses de prix d’autres catégories de biens et services. Le coût du logement (loyers et assimilés), qui représente près d’un tiers des dépenses des ménages, a notamment particulièrement augmenté (0,7% sur le mois). Sur un an, l’inflation totale est ainsi ressortie en légère décrue à 8,3% (après 8,5% au mois de juillet), mais l’inflation sous-jacente – i.e. hors prix de l’énergie et de l’alimentation – a affiché une nette progression, à 6,3% (après 5,9%, cf. graphique 1).
L’inflation mettra du temps à refluer. La très forte montée de l’inflation dès 2021 a deux explications principales : (1) une demande extrêmement forte de biens (soutenue par des politiques très accommodantes) face à des chaînes de production en difficultés du fait des contraintes sanitaires liées au COVID et (2) des tensions sur les prix de l’énergie post-covid, exacerbées par la Guerre en Ukraine. Ces deux causes sont en train de s’assainir. Tout d’abord la déformation de la consommation en faveur des biens se modère progressivement, tandis que les chaînes de production se normalisent. Et du côté de l’énergie, si les tensions restent très fortes en Europe, les prix diminuent aux Etats-Unis. Cependant, le choc provoqué sur les prix s’est finalement avéré tellement important par son ampleur et sa durée, qu’il se diffuse progressivement à l’ensemble de l’économie, entraînant le phénomène de « viscosité » de l’inflation. Tout d’abord, les tensions se diffusent à l’ensemble des biens et services, y compris ceux non directement affectés en 2021. Les prix des services, qui représentent 61% du panier de consommation des américains, progressent aujourd’hui nettement au-dessus de la zone de confort de la banque centrale. En outre, le marché du travail reste très tendu au regard de l’écart toujours très important entre le nombre offres d’emplois disponibles et les emplois effectivement pourvus (cf graphique 2). Et les tensions sur les salaires progressent, à près de 7% sur un an, renforçant cette idée de viscosité de l’inflation, avec la mise en place d’une boucle prix-salaires. Au total, l’inflation devrait bien continuer de se modérer progressivement aux Etats-Unis, mais cette viscosité impliquera que le retour vers 2% prendra du temps.
Nouvelle réévaluation de la politique de la Réserve fédérale par les marchés. Les investisseurs ont de nouveau revu à la hausse leurs anticipations de durcissement de politique monétaire. Les marchés prévoient dorénavant des taux directeurs vers 4,25%-4,5% d’ici le début de l’année 2023, soit une hausse substantielle par rapport au niveau actuel de 2,5%. La réunion de la Réserve fédérale du 21-22 septembre sera à suivre avec attention.
Dans les événements marquants de la semaine, nous avons choisi d'évoquer la dette des pays émergents et les mesures européennes contre la crise énergétique.
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