Weekly Update - Banque du Japon : vers une poursuite de la normalisation
Avec du retard sur les autres économies développées, le Japon connaît une période d’inflation élevée et de fortes hausses des salaires, mettant fin à plusieurs décennies de déflation. Dans ce contexte, la Banque centrale du Japon (BoJ) a mis un terme à sa politique de taux négatifs il y a quelques semaines. Néanmoins, la hausse des taux fut très modérée, ce qui combiné aux anticipations de moindres baisses de taux aux Etats-Unis a entraîné le yen vers un plus bas depuis 1990 contre le dollar. Les autorités japonaises sont vraisemblablement récemment intervenues permettant une stabilisation du yen. Mais, afin de soutenir durablement sa devise, la BoJ devra probablement mettre en œuvre une normalisation plus marquée de sa politique monétaire dans les mois à venir.
Un pivot historique, mais limité. La Banque du japon a augmenté ses taux d’intérêt pour la première fois depuis 17 ans en mars dernier. La Banque centrale rompt ainsi sa politique de taux négatifs, ses taux passant de -0,1% à une fourchette de 0% à 0,1%. Elle a également abandonné le contrôle de la courbe des taux (mais se réserve le droit d’intervenir en cas de forte hausse des taux) et ses achats d’actifs risqués. La BoJ entame donc une normalisation de sa politique. Néanmoins, non seulement cette hausse fut moins forte qu’attendue par les marchés mais le gouverneur Ueda ne s’est pas engagé sur de nouvelles hausses de taux à venir. Nul doute que cette prudence était au moins en partie liée au souvenir de la mi-2006, précédente tentative de sortie de taux nuls par la BoJ qui avait été contrainte quelques mois plus tard de faire machine arrière.
Sortie de la déflation avérée. Néanmoins, la situation est aujourd’hui différente : l’inflation est bien plus élevée qu’en 2006 (2,7% sur un an en mars contre 0,3% en juillet 2006) et le taux de chômage nettement plus faible (2,6% en mars contre plus de 4% en 2006). Dans ce contexte, la croissance des salaires a été supérieure à 2% en glissement annuel depuis près d’un an, contre un rythme compris entre 0,5% et 1% dans les années pré-Covid. De plus, les négociations salariales annuelles ont marqué un plus haut de plus de 30 ans (hausse de 5,3% pour une partie seulement des salariés). Ainsi, le Japon semble bien avoir tourné la page de plusieurs décennies de déflation, marquées par une inflation et une croissance réelle en moyenne (entre 1995 et 2020) proches de zéro. Ce développement devrait permettre à la BoJ de poursuivre la normalisation de sa politique monétaire.
Plus d’une raison pour remonter les taux. L’évolution récente du yen pourrait également jouer en faveur de nouvelles hausses de taux directeurs de la BoJ. En effet, l’écart de taux entre le Japon et les Etats-Unis exerce de fortes pressions baissières sur le cours du yen, qui a perdu jusqu’à près de 15% depuis le début d’année contre le dollar (et 35% depuis début 2022), atteignant un plus bas depuis 1990. De fait, le yen apparaît nettement sous-évalué contre les principales devises. Dans ce contexte, la BoJ est semble-t-il récemment intervenue sur le marché des changes pour limiter la dépréciation du yen, qui pourrait renforcer les pressions inflationnistes. Mais de nouvelles hausses de taux de la BoJ serait bien plus efficace pour soutenir le yen, permettant à la fois de réduire l’écart de taux avec les Etats-Unis ou la zone euro et de contribuer à atteindre son objectif de stabiliser l’inflation a 2%.
Dans les événements marquants de la semaine, nous avons choisi d'évoquer la réunion de la Banque d'Angleterre ainsi que les résultats d'entreprises en Europe et aux Etats-Unis :
Comme attendu par les marchés, la Banque d’Angleterre (BoE) a laissé ses taux inchangés pour la sixième fois à 5,25%. Néanmoins, elle a envoyé plusieurs signaux laissant entrevoir une baisse des taux dans les mois à venir. Tout d’abord, un deuxième membre (sur neuf) du comité de politique monétaire a voté en faveur d’une baisse. Ensuite, le gouverneur de la BoE, Mr Bailey, a souligné qu’il était probable que la BoE doive assouplir sa politique monétaire, voire plus qu’anticipé par les marchés. De plus, il n’a pas rejeté (ni validé) la possibilité d’une baisse dès le mois de juin. Enfin, le communiqué insiste sur l’importance des données qui seront publiées d’ici aux prochains comités. Or, l’inflation pourrait refluer sous la cible de 2% (au moins temporairement) en mai et juin. Dans ce contexte, les marchés ont modérément accru leurs anticipations de baisses de taux, la première baisse en juin étant désormais escompté avec une probabilité de 60% (40% il y a une semaine) avec près de trois baisses cette année attendues par les intervenants de marchés.
Dans une semaine relativement calme en termes de données, les marchés actions ont nettement rebondi cette semaine, tirés par l’Europe et les Etats-Unis, bénéficiant du reflux des taux d’intérêt pour la deuxième semaine consécutive. De son côté, le marché japonais enregistrait une nouvelle baisse hebdomadaire. Sur le marché des changes, le dollar s’est légèrement déprécié contre l’euro mais a poursuivi son rebond contre le yen
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