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Réclamations

Weekly Update - Rome, Francfort et Bruxelles, trois villes, trois histoires différentes

Le PIB de la zone euro a subi une contraction non-annualisée de -3,8% au premier trimestre, bien plus grave que le repli de -1,2% enregistré par l’économie américaine sur la même période. Par ailleurs, le deuxième trimestre devrait être beaucoup plus faible, dans la mesure où les mesures de confinement n’ont été mises en place qu’à la fin du T1. La présidente de la BCE Christine Lagarde redoute que la baisse puisse atteindre -15% et que l’économie ne revienne pas à une « nouvelle normalité » avant l’année prochaine. Lors de sa réunion qui s’est tenue à Francfort hier, la BCE a maintenu ses taux et ses achats d’actifs, et a plutôt veillé à ce que le système bancaire dispose de liquidités adéquates. A cette fin, la BCE a étendu son programme de prêts aux banques à des taux extrêmement faibles. Par exemple, elle a ramené les taux disponibles pour ses opérations de refinancement ciblées à plus long terme à hauteur de - 1,0% pour les banques qui maintiennent en l’état la taille de leurs portefeuilles de prêts. Cette démarche est logique. De fait, les banques assurent 80% des besoins de financement des entreprises en Europe, contre 19% aux Etats-Unis. La BCE a déçu les investisseurs en décidant de ne pas augmenter la taille de son programme d’achat d’urgence pandémique (PEPP) en mars. Cela n’aurait pas dû surprendre les marchés. Elle n’a acheté qu’environ 120 Md€ jusqu’à présent du montant total planifié de 750 Md€. Il n’était donc pas urgent d’agir. Cependant, les investisseurs craignent que la BCE ait été beaucoup moins proactive que la Réserve fédérale américaine (Fed). Le bilan de la BCE a augmenté de 655 Md€ depuis fin février, tandis que celui de la Fed s’est étoffé de 2 497 Md$ sur la même période. La BCE a rassuré les marchés en déclarant être « tout à fait prête » à renforcer le PEPP et à « ajuster sa composition, autant et aussi longtemps que nécessaire », une option qui pourrait être des plus utiles pour des pays comme l’Italie. Cette semaine, l’abaissement effectué par Fitch a porté la notation de la dette italienne un cran seulement au-dessus de la catégorie « high yield » ou spéculative. Les deux autres grandes agences de notation (S&P et Moody’s) ayant confirmé la notation de Rome la semaine dernière, il y a peu de risque que cette dernière perde son statut « investment grade » pour l’heure. Néanmoins, la récession d’aujourd’hui remet une fois encore la durabilité des finances italiennes en question. La croissance du PIB nominal a fluctué entre 0,6% et 3,0% depuis la fin de la crise dans la zone euro, de même que le coût moyen du service de sa dette en pourcentage du PIB (voir graphique de gauche). L’Italie a ainsi pu conserver un ratio dette/PIB assez stable. Cependant, le moniteur des finances publiques du FMI estime que le ratio dette/PIB de l’Italie atteindra 155,5% cette année, bien audelà des 134% enregistré en 2019. Même si l’Italie est parvenue à maintenir un excédent budgétaire primaire (c’est-à-dire les recettes d’un gouvernement moins ses dépenses, mais avant le coût du service de la dette) ces dernières années, ce dernier disparaîtra en 2020, compte tenu de l’effondrement attendu des recettes fiscales et de la hausse spectaculaire des dépenses. Tandis que les achats de la BCE ont fait la part belle récemment aux obligations italiennes (voir graphique de droite), ils n’ont pas suffi à ramener les écarts de rendement aux niveaux de fin 2019. Compte tenu de l’ampleur de la crise, Rome a besoin d’aide supplémentaire. D’après Mme Lagarde, une « position budgétaire ambitieuse et coordonnée [de la zone euro] est primordiale ». A cet égard, l’incapacité de la réunion du Conseil européen organisée par Bruxelles la semaine dernière à s’accorder sur un fonds de relance commun est problématique. C’est sans doute dans des périodes comme celle-ci que l’UE devrait faire preuve d’une solidarité extrême pour ses membres les plus fragiles.

Conclusion. L’histoire de l’Union européenne est émaillée d’exemples de bonds en avant réalisés à la toute dernière minute. Les récents communiqués de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et d’Angela Merkel laissent espérer que le nœud gordien empêchant un soutien conjoint pour l’Italie et l’Espagne puisse enfin être tranché. En attendant, toutefois, les écarts de rendement entre les obligations italiennes et les obligations d’Etat allemandes (Bunds) pourraient rester obstinément élevés.

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Responsable de la Stratégie d’Investissement Société Générale Private Banking