Les vieux voiliers font encore chavirer
Pas de winchs électriques ni de mât en fibre de carbone à l’horizon... mais des voiles en chanvre, des cuivres rutilants et des poulies en bois ! Beaux, authentiques, les vieux gréements ont tout pour étancher les soifs de nature, d’aventure et de retour à l’essentiel ! Coupez le moteur et laissez-vous porter par le vent.
À bord du luxueux Lys noir, on redécouvre la beauté du golfe du Morbihan. Une parenthèse méditative au gré des vagues.
Ces voiliers admirables, gardiens de l’héritage marin, tant dans les matériaux que dans la navigation, offrent de naviguer avec authenticité.
Avec ses trois ponts, une longueur de 109 mètres et un équipage de près de 60 personnes, le Sea Cloud est véritablement majestueux. À bord, on retrouve les codes des croisières de luxe du début du XXe siècle.
Hisser les voiles vers un avenir durable
Le bateau est l’un des plus anciens modes de transport au monde. Il faut pourtant attendre le XIXe siècle pour que naissent les toutes premières croisières d’agrément.
Ce nouvel art du voyage séduit instantanément. C’est alors la course entre les compagnies maritimes pour construire des navires toujours plus grands, plus beaux et plus performants et, par conséquent, plus polluants aussi. Si aujourd’hui le monde de la croisière se réinvente et innove en matière de technologie verte pour réduire son impact environnemental, la meilleure solution pour voyager écoresponsable reste, de loin, la croisière sur un voilier ancien.
Nostalgie, nostalgie...
Les vieux gréements ont une histoire à raconter et sont de véritables légendes. À commencer par le Lys noir, luxueux yacht Belle Époque qu’un prince allemand avait commandé pour éblouir son épouse. En 1914, le yawl, ce petit voilier à deux mâts utilisé pour la plaisance comme pour la pêche, est à peine achevé dans les chantiers Barrière à Arcachon qu’il est saisi par les autorités françaises. Le prince ne naviguera jamais à son bord...
Ce petit bijou d’élégance est aujourd’hui l’un des rares voiliers de yachting de construction française encore à flot, ce qui lui a valu d’être labellisé « Bateau d’intérêt patrimonial ». Sa coque noire caractéristique, inspirée des anciens bateaux-pilotes de la Gironde, se laisse admirer le temps de courtes croisières dans le golfe du Morbihan, vers l’île d’Houat et l’île aux Moines. Parfait pour une première approche !
D’autres voiliers et croisières d’exception sur lesquels embarquer
Le Bélem : c’est l’un des plus anciens trois-mâts en Europe toujours en état de naviguer et le second plus grand voilier restant en France.
Le Götheborg : c’est l’un des plus grands navires en bois du monde, et c’est la réplique exacte d’un navire de commerce de la Compagnie suédoise des Indes orientales, construit en 1745.
Le Spitzberg : cette croisière très complète permet de découvrir les nombreux aspects du Haut-Arctique. Ce n’est pas uniquement un laboratoire à ciel ouvert, c’est avant tout une nature étonnante à la faune omniprésente : morses, rennes, phoques, ours blancs et oiseaux par milliers, le tout rythmé par des couleurs et des lumières exceptionnelles.
Un parfum d’aventure(s)
À bord du Noorderlicht, le voyage prend des airs d’expédition polaire. Après une carrière de bateau-phare en mer Baltique, le deux-mâts goélette de 1910 emmène les aventuriers du grand froid briser la glace au large de la Norvège, flirter avec les ours blancs ou les baleines et chasser les aurores boréales. Vingt privilégiés, pas plus, s’y partagent les dix cabines. Au-delà du dépaysement, l’aventure est avant tout humaine. La vie à bord d’un vieux gréement offre une expérience unique, synonyme d’échange, de partage et de convivialité. Sans compter les escales, parfois inattendues, qui, elles aussi, augurent de belles surprises et font tout le sel du voyage, comme ce rivage chargé de milliers d’oiseaux marins ou ce troupeau de rennes qui défile au loin. Le grand frisson assuré ! Et c’est bien ce qui fait une bonne part du charme de la navigation à la voile : on ne sait jamais par quel chemin le vent nous portera, ni même quand on arrivera.
Luxe, calme et volupté
Aux antipodes de la vieille marine de bois et de son armada rustique de bisquines, de pinasses, de chaloupes et de gabarres, il est un yacht de légende qui offre l’expérience ultime de la croisière de luxe : le Sea Cloud. Et son épopée est rocambolesque ! Après avoir promené tout le gratin des années 1930 sur toutes les mers du monde, l’immense et fastueux voilier des époux Hutton, de riches Américains, servira tour à tour de palais diplomatique flottant, de station météo et de chasseur de sous-marins. Racheté en 1955 par le dictateur de la République dominicaine, Rafael Trujillo, il est finalement rapatrié à Hambourg en 1978 pour y être transformé en bateau de croisière cinq-étoiles. Quand il n’écume pas les ports de la Méditerranée, le merveilleux quatre-mâts met les voiles pour les Caraïbes et emmène une poignée de croisiéristes (64) aux portes de petits paradis insoupçonnés : plages de cocotiers désertes, villages créoles et petits ports de pêche colorés inaccessibles aux paquebots chargés de milliers de passagers. À l’intimité de cette odyssée chic s’ajoute le raffinement du décor d’origine, de la cuisine et d’un équipage aux petits soins. Sur le pont en teck, voir les marins s’affairer sous les gigantesques mâtures et déployer les voiles blanches à la main est un spectacle inoubliable.
Ancien navire de pêche, le Lola of Skagen possède un gréement destiné à optimiser sa vitesse.
Le Sea Cloud, quatre-mâts majestueux, invite à l’évasion.
Le Lys noir, avec sa coque noire et son gréement aurique s’étendant sur ses deux mâts caractéristiques des yawls, fait renaître l’élégance de la navigation d’antan.
Dans la peau d’un matelot
Cependant une croisière n’est pas que contemplative, elle peut être active ! Pour s’initier à la manœuvre et partager les valeurs du matelotage, rien de mieux que d’embarquer sur le Lola of Skagen.
Un vieux loup de mer né au Danemark en 1919, tout en bois de chêne et au caractère bien trempé. Car il en a fait, des pêches en mer du Nord ! De Saint-Denis-d’Oléron ou Douarnenez, le cotre centenaire met désormais le cap sur les îles charentaises, anglo-normandes ou bretonnes. Mains sur les drisses, hissez la grand-voile, la trinquette et le foc, maniez le compas et le sextant, initiez-vous à l’art des nœuds marins, observez les étoiles et tenez la barre... Lors de croisières participatives, des marins expérimentés et passionnés sont là pour vous souffler les rudiments de la navigation à l’ancienne. Voilà de quoi vous rêver en matelot ou en capitaine de bateau !
Le nez au vent
Rien que le bruit du vent dans les voiles, le grincement du bois et le clapot des vagues sur la coque. Et soudain, le silence... instant de béatitude en totale harmonie avec la nature, les yeux plongés dans les flots bleus et l’horizon infini. Et puis, le voilier, réactif, vous arrache sans prévenir à vos rêveries contemplatives pour vous offrir de belles sensations de vitesse grâce à la gîte du bateau que produit la force du vent sur les voiles. Le pouls s’accélère et se met au tempo. Sur le pont, des parfums iodés plein les narines, vous vous sentez plus vivant que jamais. De belles émotions aussi, quand pointent dans les vagues les ailerons de quelques dauphins joueurs...
Les 5 conseils
1 - Anticipez la réservation
Les vieux gréements ne sont pas de gigantesques hôtels flottants. Les places sont limitées et certaines croisières peuvent afficher complet plus d’un an à l’avance. C’est le cas par exemple des expéditions polaires, vite prises d’assaut.
2 - Partez au bon moment
Pour bénéficier de conditions de navigation idéales, privilégiez les côtes atlantiques et européennes en été et les destinations plus exotiques des Caraïbes en hiver.
3 - Prenez date
Les fêtes et les manifestations nautiques sont une belle occasion pour venir admirer les vieux gréements, voire pour monter à leur bord, à l’occasion de leur regroupement. Le festival Ostende à l’ancre en Belgique (juin), les Fêtes maritimes de Brest et de Douarnenez (juillet), le Festival des voiles de travail à Granville (août), la Fête des vieux gréements et le Festival du chant de marin à Paimpol (août) sont autant de rendez-vous incontournables.
4 - Embarquez quelques livres
Deux années sur le gaillard d’avant de Richard Henri Dana, L’Odyssée de l’Endurance d’Ernest Shackleton, Le Bateau qui ne voulait pas flotter de Farlay Mowat… entre deux escales, plongez-vous dans ces récits d’aventures maritimes à bord de vieux gréements. Captivant !
5 - Prenez du chaud et du froid
Sur l’eau, le ressenti de la température peut être différent. Soyez prévoyant car, même si les conditions météorologiques s’annoncent idéales, elles peuvent changer très rapidement.