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Flash Update - Des prix du pétrole en dessous de zéro… qu’a-t-il bien pu arriver ?

Les prix pétroliers étaient déjà faibles avant l’apparition des craintes relatives au coronavirus. Au début de l’année, l’Agence d’information de l’énergie (AIE) a signalé que l’offre de pétrole dépassait la demande (voir graphique de droite), avec une accélération de la production américaine de pétrole de schiste à des plus-hauts historiques.
Lorsque la Chine a annoncé le confinement de la province de Hubei à la veille des congés du Nouvel an lunaire, les prix du baril de Brent avaient baissé de 8% depuis fin décembre. Alors que la propagation de la pandémie s’accélérait au cours des semaines suivantes, les prix pétroliers ont poursuivi leur baisse, les traders réalisant que les restrictions d’activité et de déplacement devraient fortement réduire la demande de pétrole.
Ce nouveau contexte de marché a fait pression sur l’OPEP et ses alliés, Russie en tête, pour convenir de baisses de production lors de leur réunion de début mars. Cependant, les espoirs ont été balayés après que la Russie a refusé de procéder à une nouvelle réduction de sa production. Puis l’Arabie saoudite a déclaré une guerre des prix en augmentant la production du royaume de 25%, dans l’espoir de pousser les producteurs américains de pétrole de schiste à réduire la leur.
Il en a résulté un grave déséquilibre sur le marché pétrolier. L’effondrement de la consommation lié au coronavirus devrait se traduire par une réduction de 20 à 30 millions de barils/jour (mb/j) ce mois-ci. A fin mars, le baril de Brent avait baissé de 65% depuis le début de l’année, encourageant le Président Trump à négocier une nouvelle réunion d’urgence entre l’OPEP et la Russie. Les négociations ont toutefois été difficiles, et il n’est guère surprenant que les baisses de 9,7 mb/j finalement convenues le 12 avril ne soient pas parvenues à stabiliser le marché.
Avec une baisse de 25% de la demande des raffineries ces dernières semaines, les capacités de stockage se sont rapidement saturées, en particulier aux Etats-Unis où la production n’a reculé que de 7% par rapport aux plus-hauts historiques de mars. A Cushing, Oklahoma, où le pétrole brut West Texas Intermediate (la base du marché à terme américain) est stocké, les réservoirs étaient remplis à hauteur de 80% le 17 avril d’après l’AIE. Et Plains All-American Pipeline (un important transporteur de pétrole américain) prévoit qu’il ne restera aucune capacité de stockage d’ici à début mai.
C’est précisément cette dynamique qui a poussé les prix du pétrole brut américain en territoire négatif. Les détenteurs de contrats à terme sur le pétrole arrivés à expiration le 21 avril sont contraints de prendre une livraison physique de brut en mai. En l’absence de capacité disponible, les traders n’ont pas su assurer le stockage du pétrole qu’ils s’étaient engagés à acheter et ont été obligés de se débarrasser de leurs contrats au prix de lourdes pertes. Lundi 20 avril, les prix ont chuté vers zéro, puis ont plongé en territoire négatif. De fait, les vendeurs forcés ont dû payer les acheteurs pour prendre leurs contrats.

Conclusion. Cette dynamique ne devrait pas changer dans les prochaines semaines. Compte tenu des mesures de confinement liées au coronavirus et des restrictions de déplacement, la demande de pétrole restera faible et la production ne devrait pas baisser suffisamment pour stabiliser le marché. Par ailleurs, au vu de la capacité de stockage limitée, les traders resteront préoccupés par les problèmes de livraison. Les prix pétroliers pourraient donc rester faibles et extrêmement volatils pour le moment. Ce n’est qu’après l’assouplissement des mesures de confinement, la mise en place des baisses de production et l’expédition en raffinerie de l’excédent de pétrole stocké que le marché pétrolier pourra se stabiliser.

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Responsable de la Stratégie d’Investissement Société Générale Private Banking