Gain du vendredi 13 : illustration de la « pensée magique », biais classique en Finance Comportementale
Qui l’emportera entre le loto et Spirou ?
Le vendredi 13 est toujours attendu avec une certaine impatience par la Française des Jeux. Et pour cause ! Celle-ci voit le nombre de joueurs de loto quasiment doubler et le nombre de mises aux jeux de grattages augmenter de l'ordre de 20%. Bien que ce phénomène se répète chaque vendredi 13, il ne semble pas rationnel pour autant. Ainsi, considérant qu’un individu a statistiquement autant de chances de gagner le vendredi 13 que tout autre jour de l’année, il est difficile de cerner la logique de ce phénomène si ce n'est en l’imputant aux réactions émotionnelles. Cette ruée vers les jeux de hasard en ce jour précis traduit avant tout une tendance à la « pensée magique », biais bien connu de la Finance Comportementale.
Ce biais se définit comme le fait d’être convaincu de pouvoir influencer le cours des choses, notamment grâce à des fausses relations de causes à effets : « Je joue le vendredi 13, j'ai davantage de chances de gagner ! ». Cette tendance, particulièrement mise en lumière par les jeux de hasard, a été étudiée par Ellen Langer (« The illusion of control », 1975) avec les conclusions empiriques suivantes : un joueur pouvant choisir librement son billet de loto (et donc son numéro) misait en moyenne quatre fois plus que lorsque le billet lui est imposé. De plus, les joueurs acceptaient de céder le billet librement choisi dans seulement 63% des cas, contre 81% pour un billet dont le numéro leur avait été imposé. Enfin, le prix de revente de ce billet était quatre fois plus élevé quand le billet (et donc le numéro) avait été choisi par son détenteur ! De façon générale, le chiffre 13 ne laisse pas indifférent : absence de chambre 13 dans certains hôpitaux, absence de treizième étage dans certaines tours … A l’inverse, le magazine Spirou est connu pour sa page « 12 bis » visant à … tourner en dérision cette superstition !
Retour en enfance… au grand dam des performances financières !
Côté pile, ce biais nous offre un coup de jeune : c’est en effet entre les âges de cinq ans et de sept ans que l’être humain est le plus sensible aux pensées magiques ! Mais côté face, quand arrive l’âge de gérer ses finances personnelles, cette tendance nous entraîne malheureusement surtout dans un déni de la réalité ! S’il ne suffit pas d’encourager un sportif derrière sa télévision pour le voir gagner, il ne suffit pas plus de désirer ardemment une forte hausse de la valeur d’un investissement pour que - comme par magie - celui-ci s’apprécie. De façon concrète, le refus de céder un actif financier en moins-value et sans potentiel de rebond constitue sans doute l’une des principales conséquences néfastes de ce biais sur la gestion des finances personnelles. Victimes de cette tendance, certains individus peuvent également être amenés à prendre des décisions d’investissement malheureuses car reposant principalement sur des espoirs de gains totalement irrationnels. De façon plus générale, la pensée magique fait les délices de ceux qui cherchent à exploiter la crédulité, par exemple en présentant des produits « miracles » qu’ils soient financiers ou non.
Le vœu d’être lu jusqu’au bout s’étant réalisé - probablement à force de le formuler ! - il reste à souhaiter bonne chance à tous pour le prochain vendredi 13 !